Vous voudrez bien excuser le caractère un peu personnel de cet éditorial mais il est le dernier que j’ai le plaisir de signer. En effet, le prochain, qui ne sera édité qu’en 2020, portera la marque de mon successeur, le professeur Philippe Eckert, à qui je passerai le témoin progressivement dès cet automne.
A l’heure où j’écris ces lignes, nous avons déjà largement entamé l’année 2019, une année de multiples transitions puisque nous aurons aussi dès ce printemps une nouvelle conseillère d’Etat en la personne de madame Rebecca Ruiz, qui succède à monsieur Pierre-Yves Maillard avec qui j’ai eu le plaisir et la chance de collaborer durant 11 ans.
Employé du CHUV depuis 1981, c’est le moment pour moi de faire, avec un peu de nostalgie, je l’avoue, un bilan de ces 38 ans consacrés à notre institution et au service public. Je mesure toute la chance que j’ai eue, non seulement de pouvoir exercer le plus beau métier du monde dans une période d’un dynamisme inégalé où la médecine a progressé plus que dans tous les siècles passés, mais surtout le bonheur quotidien de rencontres exceptionnelles avec des patientes et des patients, des collègues et de nombreuses personnalités que mes fonctions m’ont permis de côtoyer. C’est un privilège rare qui m’a nourri et enrichi tout au long de ma vie. C’est donc avec une immense reconnaissance que je vous quitterai à la fin de l’année.
Que m’ont appris toutes ces années passées au service d’un hôpital public et de nos patientes et patients, et qui pourrait inspirer tous ceux qui se destinent à une carrière hospitalière? Je distingue trois étapes clés. La première: c’est la période d’apprentissage du métier. Elle est exigeante. C’est le temps durant lequel chaque professionnel se focalise sur les aspects techniques de sa spécialité. C’est un moment passionnant parce qu’il permet d’accéder peu à peu au cœur de la médecine. Le moteur qui nous anime alors est de travailler à nous améliorer constamment pour être digne de traiter les patientes et les patients en toute indépendance.
Une deuxième phase s’ouvre ensuite dès qu’on a la chance d’endosser une responsabilité de direction, quelle qu’elle soit. En tant que professionnelle ou professionnel confirmé·e, on est alors maître de son art, même s’il faut constamment continuer à se perfectionner. Mais dès ce moment, on devient également responsable des plus jeunes, dont on doit accompagner l’apprentissage et guider la carrière. On devient, comme je le dis parfois, «en charge d’âmes». Cette tâche supplémentaire, pour laquelle on est peu préparé·e, est pourtant essentielle. Elle demande une réflexion sur notre nouveau rôle et une prise de conscience qui modifie profondément notre manière de fonctionner. Il s’agit dès lors d’être prêt·e à donner plus qu’à recevoir.
La troisième étape, que j’ai vécue, survient lorsque vous devenez cheffe ou chef de département, directrice ou directeur général. Les responsabilités s’élargissent alors et dépassent les aspects liés purement à votre métier. Il s’agit d’opérer une nouvelle mue: ne plus être uniquement soignant·e et pédagogue, mais savoir traiter et trancher des problèmes parfois fort éloignés de la médecine. On s’aperçoit alors qu’il est impossible d’assurer toutes ces décisions et ces choix seul·e. Il faut être parfaitement au clair sur ses propres limites, savoir déléguer et s’entourer de collaboratrices et collaborateurs très compétents en leur faisant totalement confiance, mais aussi, en retour, en justifiant leur propre confiance par une attitude soutenante et bienveillante. Bref, il faut être prêt à devenir une cheffe ou un chef de tribu complètement disponible. C’est la chance que j’ai eue avec toute l’équipe de direction actuelle. J’exprime ici à chacun·e d’entre elles et eux toute mon admiration et ma gratitude pour leur engagement exceptionnel et leur loyauté sans faille.
A la veille de mon départ, je suis conscient que, dans un hôpital aussi complexe que le CHUV, rien n’est jamais parfait. Il reste énormément de travail à accomplir. Mais je suis très fier de laisser à mon successeur une institution dynamique en pleine expansion, avec des collaborateurs motivés et compétents. Je suis sûr, connaissant les qualités humaines et professionnelles de mon collègue Philippe Eckert, qu’il poursuivra l’œuvre déjà accomplie et la développera encore. Je lui souhaite autant de satisfaction que j’en ai eu à diriger cette belle institution.
A toutes et tous, je dis merci de tout mon cœur pour la confiance que vous m’avez accordée tout en vous rappelant, même si cela n’est pas nécessaire, que notre devise est «Sciences et Humanité». Cela signifie que notre hôpital est un lieu d’accueil où les patientes, les patients et leurs proches, quels qu’ils et elles soient, méritent toute notre attention, toutes nos compétences et toute notre compassion.
Le CHUV est l’un des cinq hôpitaux universitaires de Suisse aux côtés de ceux de Genève, Berne, Bâle et Zurich.
Il est à la fois l’hôpital régional pour la population de l’agglomération lausannoise et ses environs, et l’hôpital tertiaire, le centre de référence spécialisé pour tout le canton de Vaud et une bonne partie de la Suisse romande.
patientes et patients
hospitalisé·e·s
de femmes
nationalités représentées
urgences traitées
collaboratrices et collaborateurs
au 31 décembre 2018
milliard de francs de budget
(chiffre arrondi)